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Les différentes facettes de la traduction créative

[Article rédigé par Amélie Vergne dans le cadre de sa participation au collectif La Linguistiquerie.]

La traduction est une discipline complexe, allant bien au-delà du simple passage au mot à mot d’une langue à l’autre. Ainsi, au-delà des techniques à adapter en traduction, il existe même différents types de traduction. Là où une notice de sèche-cheveux devra être traduite de manière assez littérale, en prenant soin de conserver la terminologie technique adaptée, une publicité, une chanson, un jeu vidéo ou encore une brochure de musée feront nécessairement appel à une traduction plus créative. Ce second type de traduction porte généralement sur les contenus dits plus « rédactionnels », et implique souvent, au-delà de retranscrire le sens de chaque mot, de communiquer certaines images et émotions. Voyons ensemble les différences qui existent entre différents types de traductions créatives.

La traduction d’édition

Je commence tout de suite par le premier type de traduction créative qui vient généralement à l’esprit des gens : la traduction d’édition, que certaines personnes résument parfois sous le terme de « traduction littéraire ». Pour le grand public, c’est même généralement l’image des traducteurs et traductrices : quelqu’un qui traduit des romans. Dans les faits, très rares sont les personnes qui exercent ce métier, car il s’agit d’une discipline bel et bien distincte de la traduction dite technique. Il existe d’ailleurs deux associations professionnelles différentes pour ces deux types de traduction, ainsi que deux statuts à part entière : bref, si les deux activités peuvent être cumulées, elles sont totalement différentes l’une de l’autre !

Pour clarifier le terme de « traduction d’édition » : il s’agit de la discipline visant à traduire tout le contenu ayant vocation à être publié. Ainsi, il peut s’agir de romans, de livres pour enfants ou de BD, mais également de livres de cuisine, ou de magazines spécialisés, par exemple. Ici, la dimension créative apparaît assez claire : qu’il s’agisse d’une œuvre littéraire ou non, il convient de retranscrire un univers, de susciter des émotions, de rendre un style, une plume, que ce soit pour plonger le lectorat dans une histoire ou pour lui donner envie d’essayer telle ou telle recette, par exemple !

La localisation

Nous avons déjà évoqué la localisation dans un article précédent, donc je ne m’éterniserais pas dessus, mais en voici un récapitulatif. La localisation consiste en la traduction et l’adaptation à une culture source d’un contenu multimédia, comme un site Internet, une application ou un jeu vidéo. C’est un exercice très particulier, qui nécessite de respecter de nombreuses contraintes tant d’un point de vue technique (restrictions de caractères, gestion des espaces réservés…) qu’au niveau de l’adaptation. Pour un jeu vidéo, par exemple, trouver des noms de personnages ou de sorts à la fois parlants et qui sonnent bien dans un pays cible est tout un art. Je vous invite à consulter ce fascinant article de Libération qui explique la réflexion derrière la traduction des noms de Pokémon : il illustre bien la complexité de l’exercice, et toutes les compétences créatives qu’il implique !

La transcréation

La transcréation va au-delà de la simple traduction : elle implique en réalité souvent de réécrire le texte afin que des jeux sur les sonorités, la musicalité ou le style soient d’autant plus percutants en langue cible. Elle peut par exemple s’appliquer à du contenu marketing, comme une publicité, mais également à des chansons ou comptines pour enfants. On s’éloigne ici d’un objectif de fidélité au texte source pour procéder à une réelle adaptation créative : plus que jamais, le texte doit sembler avoir été rédigé directement en langue cible… Quitte à s’éloigner de la source !

C’est par exemple le procédé qui a été utilisé pour adapter les chansons des films Disney d’une langue à une autre. Ici encore, cette discipline implique de prendre en considération de nombreux aspects : non seulement le sens global, mais aussi le rythme, la musicalité, les images qui s’affichent à l’écran, l’effet produit sur les spectateurs et spectatrices… Et pour restituer au mieux l’original, il convient alors souvent de s’en éloigner ! Je vous laisse regarder cette vidéo de la chaîne YouTube leTradapteur pour mieux comprendre les tenants et aboutissants de la transcréation, ici aussi appelée tradaptation.

La traduction créative : traduire au-delà du sens

La traduction créative s’inscrit donc comme un ensemble de disciplines complexes, laissant place à d’autres enjeux que ceux de la traduction technique. Le traducteur ou la traductrice revêt ici un véritable manteau d’auteur ou d’autrice, car ces disciplines impliquent souvent un véritable travail de réécriture du texte. Au-delà d’une simple retranscription du sens, cela implique d’adapter la forme d’un texte et ses effets pour un public cible, ayant grandi dans une culture imprégnée de codes culturels différents et dont la langue présente des spécificités qui lui sont propres. Il convient alors de jongler entre ces différents aspects pour tenter de reproduire au mieux la finalité d’un contenu, et de le rendre attrayant pour une audience cible… Quitte à s’éloigner du texte source ! Les choix de traduction pour y parvenir peuvent être variés, mais j’espère que ces quelques lignes vous auront permis de mieux comprendre pourquoi une adaptation paraît parfois si éloignée du contenu original.

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